Je n’aurais jamais cru écrire ce texte il y a quelques mois. Depuis les cinq dernières années, le voyage est au cœur de ma vie, au cœur de mes priorités. Je me levais et je pensais voyage, je naviguais sur internet et je pensais voyage, je travaillais pour voyager, bref, ma vie était construite autour de cette grande passion qui m’habite. J’ai toujours dit haut et fort qu’une vie de sédentaire, ce n’était pas pour moi. À chaque retour à la maison, la déprime s’emparait de moi et me faisait me sentir mal, pas à ma place. Le dernier retour a été particulièrement compliqué pour moi… J’ai passé les premières semaines révoltée. Contre le système, contre l’inertie des gens de mon entourage face à la crise environnementale, contre les ravages de notre société de surconsommation. J’avais qu’une envie : me faire des sous cette été pour ensuite m’exiler ailleurs sur la planète.
Sauf que… dans la vie, tout se passe pas toujours comme prévu…
Premièrement, j’ai pris conscience que même si je passe mes journées à m’en faire pour le sort des êtres humains et que j’angoisse jour et nuit avec ça, ça changera rien. Y’a que les actions concrètent qui peuvent réellement faire une différence. Apprendre à vivre en harmonie avec mes valeurs, et les enseigner à ceux que je côtoie. Pas dans la colère, sinon ça mène à rien. J’ai encore beaucoup de travail sur moi-même à faire avec tout ça, mais j’y crois.
Il m’est aussi arrivé un drôle de truc cet été… Tout le monde le sait, voyager, c’est des au revoir constant. C’est une vie sociale plutôt compliquée, avec des amis qui se font une vie sans toi, dans laquelle c’est parfois difficile de revenir et de reprendre comme si de rien était, comme si on avait rien manqué. Je m’étais fait une carapace avec ça en voyageant. Même si je gardais contact avec certains de mes bons amis, chaque fois que je revenais, je n’en faisais pas nécessairement une priorité, de peur de me faire trop mal en repartant. La vie a placé les bonnes personnes cet été sur ma route et un soir, en me couchant, je n’ai pas pu retenir mes larmes. Des larmes d’une joie intense qui prenait toute la place dans mon ventre. Ça me faisait un bien fou d’être entouré de gens. Ça m’avait manqué, beaucoup plus que je le pensais.
C’est hyper cliché mais je me suis également rendu compte que je voyage beaucoup pour le high que ça apporte, qui me fait oublier mes soucis. En gros, depuis 5 ans, je mets les problèmes de ma vie sur pause et je tombe de haut quand je reviens à pieds joints dedans. J’ai toujours eu une belle relation avec ma famille, sauf que dans les dernières années, ma relation avec ma mère était pas toujours à son plus fort. Elle avait d’un sens perdu sa fille unique qui, du jour au lendemain, ne vivait que pour voyager. Son cœur de maman avait mal, et moi je ne comprenais pas totalement ça. Chaque fois que je revenais, elle voulait rattraper le temps perdu et moi je ne pensais qu’à mon indépendance. Je me frustrais avec le fait que mes parents et mes proches aient un mode de vie complètement différent du mien et je me fermais parfois à eux, pour me protéger. J’ai pris une claque en réalisant dernièrement que mon attitude servait à rien, et qu’il serait peut-être temps de guérir certaines blessures en moi. J’ai retrouvé une relation beaucoup plus saine avec ma maman, après de grandes discussions où on a pris le temps d’expliquer nos deux partis et où on a trouvé un juste milieu pour vivre en harmonie.
Il y a aussi un imprévu qui est venu bousculer mes plans et remettre mon futur en question. Mon couple n’est plus. En prenant en compte que tous mes voyages des dernières années (ou presque !) avaient été à ses côtés, je mentirais si je disais que ça ne me fait rien du tout. Mes souvenirs de voyage sont empreints de lui et de moi. Je sens pourtant que c’était la bonne chose à faire et je suis vraiment en paix avec cette décision. Malgré tous les bons côtés de cette relation-là, il y avait bien des choses qui clochaient et que je dois, encore une fois, apprendre à guérir.
Aujourd’hui, je me sens prête à me poser un moment dans mon pays natal et prête à débuter un nouveau chapitre de ma vie. Un grand voyage mais cette fois, un voyage au cœur de moi-même, à prendre soin de moi et à trouver un semblant de calme dans ce chaos intérieur qui m’habite, dans toutes ces choses qui me révoltent au quotidien. Une nouvelle page de mon histoire avec des actions en communion avec mes valeurs, comme ce nouveau boulot dans un magnifique petit restaurant végétalien/végétarien dans ma ville. Je ne mets pas un trait sur ma vie de voyageuse, loin de là. Je ne sais pas quand je reprendrai la route, ni pour combien de temps, mais je crois fermement en ceci : peu importe le chemin qu’on décide d’emprunter, l’important c’est d’être heureux et bien avec soi-même. Et si pour retrouver cette petite lumière qui s’est peu à peu effacé en moi, je dois rester à la maison un certain temps, qu’il en soit ainsi.
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